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Années 60-70
MEZNARIE

En France, préparer une NSU TT était lié automatiquement à Louis Meznarie. Je vous livre intégralement un article paru dans "Auto Passion" en 1989

 

 

 

 


 

 

Louis Meznarie

Treffen Neckarsulm

juin 2006

 
Difficile, voire impossible, d'évoquer les NSU sans vouloir revoir un des principaux artisans de leurs victoires en compétition. C'est ainsi que rendez-vous fut pris avec Louis Meznarie, le sorcier de Corbeil Essonnes. Homme discret et passionné, son visage s'illumine dès qu'il se prend à évoquer son aventure avec N.S.U.

 Louis Meznarie: Ma collaboration avec NSU remonte à 1953. A cette époque, j'étais agent deux roues pour la marque, et participais régulièrement à des trials et des moto-cross à leur guidon. Je préparais moi-même mes machines. Je prenais beaucoup de plaisir dans ces épreuves, et devais terminer 3e du Championnat de France de trial en 57 Malheureusement, un accident de la route, au guidon de la moto d'un client que j'essayais, devait y mettre un terme définitif. Pour ne rien cacher, cet incident de parcours coïncidait avec la chute des ventes des deux roues, survenue en fin de décennie 50.

L.M. : « C'était finalement un mal pour un bien, car la reconversion s'avérait obligatoire. Aussi, l’orientation nouvelle de NSU vers les quatre roues devint ma planche de salut. De plus, j'entretenais des relations privilégiées avec l'usine. Cela facilitait amplement ses tractations ».
Si l'on ajoute à cela le fait que les premières séries Prinz commercialisées recevaient des mécaniques très proches de celles des motocyclettes, la reconversion pouvait s'opérer sous les meilleurs auspices.
L.M. : « Lorsque l'usine décida d'engager les Prinz III de série au Tour de France automobile en 1963, je fus sollicité pour assurer leur assistance, je suis devenu ainsi une sorte de coureur par procuration! A cette époque, ma contribution se bornait à la maintenance car je n'avais effectué aucune intervention sur les voitures. Les pilotes étaient alors des employés de l'importateur CEIDA NSU qui quittaient temporairement leur poste pour participer aux épreuves. II s'agissait toutefois du tout premier « service compétition» de la marque. Cette situation devait durer jusqu'à 1965 environ.
 Dès la commercialisation des 1000, l'infrastructure devait être profondément remaniée. Les pilotes maison » n'étaient plus en mesure de permettre un développement logique, et il fut, pour la première fois, fait appel à des pilotes professionnels. Ainsi dès 1966, une équipe de choc était constituée. Louis Meznarie suggérait le nom de Gérard Larrousse, un jeune homme habile qui oeuvrait alors au volant d'une Dauphine 1093. II fut incorporé au premier service course en compagnie de Guy Chasseuil et de Marie Claude Beaumont.
L.M. : « L'usine me demanda alors, et très officiellement, de développer les autos. C'est avec un budget qui ferait sourire de nos jours, et une foi inébranlable que je me mis au travail. J'ajoute toutefois, que ces années furent, sans doute, les meilleures de mon existence. Très rapidement, l'usine mit à ma disposition tous les moyens pour faire évoluer les autos. J'entretenais des relations privilégiées avec certains ingénieurs. II me fallut peu de temps pour obtenir de l'usine, un « laissez-passer » permanent, me donnant accès à tous les services techniques. Mais cette collaboration ne s'arrêtait pas là. ll m'était possible de disposer de toutes les pièces nécessaires au développement. C'était merveilleux! Ajoutons à cela, que mes rapports amicaux avec mon homologue Allemand Spiess, me facilitèrent largement la tâche ».
Michel Leroux: Le développement des autos de course vous posait-il des problèmes particuliers ?
L.M. : « A dire vrai, le concept simple et fonctionnel du moteur de la TT, permettait un développement dans les meilleures conditions possibles. Les culasses étaient en deux parties, soit une culasse par groupe de deux cylindres. A ce niveau, je n'étais confronté qu'à des problèmes d'étanchéité, que je mis un certain temps à résoudre. En revanche, ce fut plus long pour les vilebrequins, qui nous créaient quelques soucis. La bielle du troisième cylindre « coulait » fréquemment, pour d'obscures raisons. Dans un premier temps, j'équipai toutes les voitures de radiateurs d'huile, car elles en étaient dépourvues d'origine. Mais le problème subsista. Il me fallut bien longtemps pour découvrir que sur le cylindre concerné, le trou de graissage se trouvait au sommet du maneton, lorsque le piston se trouvait au point mort haut. Ainsi, la charge importante qui régnait dans cette zone était-elle la cause de ces ruptures. Je fis donc modifier par l'usine le positionnement de ce trou de graissage pour qu'il se trouve sensiblement dans l'axe longitudinal du vilebrequin. Les problèmes de rupture de film d'huile disparurent comme par enchantement»
M.L. : Au cours de la longue et brillante carrière des NSU, avez-vous rencontré d'autres problèmes chroniques?
L.M.: «II va de soi qu'avec des moteurs dont la puissance devait doubler en quelques années, nous étions confrontés à quelques problèmes de fiabilité. Ce fut notamment le cas pour les cylindres qui, au cours des alésages successifs, devenaient fragiles. N'oublions pas qu'en fin de carrière les moteurs atteignaient 1300 cm 3 et dépassaient largement les 100CV, Cette cylindrée était pourtant indispensable pour tenter de lutter contre la concurrence. »
M.L. : Cela concerne évidemment l'ultime évolution, mais je suppose que vous avez été confronté à d'autres problèmes en cours de carrière.
L.M. : « Paradoxalement, la structure globale de la TT était très robuste. Cela me permit de me consacrer en majeure partie à son développement. Toutefois, pour répondre à votre question, je me souviens avoir connu quelques problèmes d'apparence mineure, sans être pour autant négligeables. Les freins arrière, par exemple, devaient me créer quelques soucis. Les ruptures des tambours étaient fréquentes! Ces maudits tambours avaient en effet une fâcheuse tendance à se découper autour du moyeu, entraînant perte de roues et sortie de route.
 J'avais, depuis le départ, pris l'habitude de recourir aux pièces disponibles de la gamme; je m'aperçus un jour que les tambours des petites Prinz présentaient certains avantages. Une simple modification me permit de les adapter, et ce problème, qui, je l'ajoute, ne concernait que les voitures de compétition, disparut. II était temps, car l'usine m'avait fait passer des notes stipulant une suspension du programme, si ce problème, préjudiciable à l'image de la marque, n'était pas dûment résolu. Ce fut également le cas pour les gicleurs de ralenti électriques qui en étaient à leurs balbutiements. La masse engendrée par le porte-à-faux du petit électro-aimant pesait outrageusement sur le filetage du carburateur en alliage léger. Les desserrages et ruptures étaient fréquents et entraînaient des conséquences qui pouvaient aller jusqu'à l'incendie. La recherche constante permettait de venir à bout de ce genre de problème. » Vous en souvenez-vous?
 Si les NSU sportives servirent de... tremplins à ces futurs champions et championnes qui s'appelaient Marie-Claude Beaumont, Guy Chasseuil, Bernard Darniche et Gérard Larrousse, peut-être a-t-on oublié que de 1963 à 1973 ce quatuor majeur fut régulièrement entouré, parfois même imité, par des pilotes qui, eux aussi, « firent leur chemin ». A défaut de ne pouvoir citer tout le monde, évoquons, tout de même, de mémoire (et par ordre alphabétique), les mérites et succès de : Beckers (Christine), Behra (José, puis Jean-Paul), Boucher, Buyssens, Buzzl et son inséparable Conso, Cartier, Decourteix, Derolland (Ginette), Despointes, Dini (frères), Emeric, Errant, Etchebers, Evrard, Flament (bis), Gamet (frères), Garant, Gicquel, Greder (mais oui, Henri!), Guitteny, Hanrioud, Langlois (Patrick), Loiseau, Mercier, Morel, Motte, Pignard, Pitt (la regrettée et si gentille Cathy), Rué, Santonacci, Sevelinge, Sola (Sr), Swietlik, Vincent et beaucoup d'autres dont Annie Wamberghe et même... Stéphane Collaro !   
S'exprimant avec calme, et fouillant le passé, Louis Meznarie, disparaît fugitivement dans ses pensées. Dans son regard, toute la passion et la magnificence de ce segment de sa vie. Les anecdotes fusent sur cette période où les choses sérieuses n'étalent pas, pour autant, prises au tragique. La connivence entre les pilotes et le préparateur, constituait déjà le premier gage de réussite.
 II s'absente. Sacré Mr. Louis, le voilà qui revient les bras chargés de revues, prospectus, et autres souvenirs! Puis il sort religieusement d'une boite un classeur de dimensions respectables. Y sont réunies toutes les coupures de presse, photos, et autres preuves d'un passé florissant. Notre hôte disparaît alors totalement à travers ses images, commentant chacune d'entre-elles comme dans l'instant présent. Certaines m'étaient familières. De ces temps-là, subsistent des souvenirs mais aussi des amitiés. Ainsi, Gérard Larousse ne l'a pas oublié. Quittant Alpine, quand il passa chez Porsche, Gérard n'eut de cesse de convaincre son ami Louis. Et quand NSU fut absorbé par V.W. Audi, Meznarie suivit son champion. En 1970 il était agent officiel. Une nouvelle carrière et de nouvelles réussites attendaient le sorcier de Corbeil-Essonnes. Un sorcier souriant qui malgré tout conserve le goût pour les NSU qui lui ont tant apporté. Ainsi, collectionnant les 2 roues les plus représentatifs de la marque, il ne dédaigne pas de refaire, de temps à autre, un petit moteur de TT. Le dernier en date, sort de ses ateliers. II n'est autre que celui de notre voiture d'essai!

 

 

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